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Le viaduc de Viroflay a été construit entre 1851 et 1852. Il avait pour but de faciliter une deuxième entrée dans Paris pour les trains venant de l’Ouest. La ligne de Montparnasse desservait la rive gauche de la Seine. Pour la rive droite, cette liaison fut créée en profitant de la voie existante entre Saint Lazare et Versailles. En conséquence de gros travaux furent menés à bien : le raccordement des lignes à Viroflay, au point de distance minimale, et la création de deux voies à Saint Lazare, qui sont maintenant dévolues à la liaison de Versailles. L’ensemble reste un monument emblématique de Viroflay
Un article de l’Illustration daté du 3 janvier 1852 relate en détail l’histoire de ce projet et l’état des travaux. La transcription est fournie ci-dessous avec quelques gravures d’illustration. L’article d’origine est fourni en document joint, en bas de page.
Aux termes de la loi du 21 avril, 3 et 13 mai 1851, le chemin de fer de l’Ouest doit pénétrer dans Paris par deux côtés, la rive droite de la Seine et la rive gauche.
L’existence simultanée des deux chemins de fer de Versailles a, sans aucun doute, dicté cette résolution prise par l’Assemblée nationale. Tous deux, têtes naturelles du chemin de l’Ouest, ils pouvaient prétendre à obtenir la préférence ; il a paru plus juste de partager le profit.
Les établissements construits en vue du service de Versailles et des localités desservies par les deux voies devenaient insuffisants pour une exploitation aussi considérable que celle de la ligne de l’Ouest, qui traverse plusieurs de nos départements les plus riches ; de grands travaux étaient nécessaires pour terminer l’embarcadère du boulevard Montparnasse et pour développer celui de la rue Saint-Lazare.
La compagnie concessionnaire du chemin de l’ouest, substituée par son traité à tous les droits de l’Etat, devait en outre terminer les différentes constructions en voie d’exécution sur tous les points de la ligne. Sur la rive gauche, tout était commencé ; sur la rive droite, tout était à faire : il fallait tout créer, même le terrain.
Pour mettre la compagnie de l’Ouest à l’abri de toute éventualité dans la dépense, et pour donner des garanties aux compagnies de Versailles et de Saint-Germain, intéressées à la prompte exécution de ces travaux, celles-ci ont entrepris à forfait les immenses constructions que les voyageurs des deux lignes voient s’élever comme par enchantement. Trois ateliers principaux sont établis entre Paris et Versailles ; le plus important est celui de la gare de Paris, puis celui de Clichy pour l’élargissement de la voie, et enfin celui de Viroflay, où le chemin de fer, se bifurquant, traverse une vallée profonde, passe au-dessus de la route nationale de Paris à Brest, et vient rejoindre le chemin de la rive gauche.
Le périmètre de la gare de Paris va presque doubler : il était, avant le commencement des travaux, de 6 627 mètres de superficie ; lorsque tout sera terminé, il en comprendra 12 700. Les 6 173 mètres que l’on va ajouter, il faut les conquérir à la pointe de la pioche, le niveau de la gare étant de 9 mètres environ en contrebas du sol des terrains environnants. Puis il faut percer un tunnel parallèle à celui qui existe déjà ; puis... Mais les propriétaires voisins refusent d’entrer en arrangement ; le jury doit être assemblé pour prononcer souverainement. Cependant les travaux ne se ralentissent pas, malgré l’espace resserré : là où on pourrait employer deux cents ouvriers, il n’y a de place que pour cent ; une grosse motte de terre, sur laquelle se trouve un jardin, jadis propriété de l’un des frères de l’empereur, doit être respectée jusqu’à la décision suprême ; le square de la place de l’Europe résiste, et il ne faudra pas moins que le verdict du jury pour qu’il consente à devenir jardin suspendu au-dessus du | robuste tunnel que l’on doit construire ; et cependant le tunnel avance : commencé par les deux extrémités, il est près d’atteindre les limites que lui imposent le respect dû à la propriété d’autrui ; vienne l’autorisation, et le passage sera bientôt ouvert.
La gare de Paris pour le service de l’ouest et de Versailles sera située à gauche des voies affectées au service de Saint-Germain ; deux groupes de quatre voies chacun seront établis parallèlement aux groupes de Saint-Germain, d’une longueur suffisantes pour permettre sur les deux quais du départ un stationnement de vingt- six voitures ; puis ces huit voies n’en formeront plus que deux qui traverseront le square de l’Europe sous le nouveau tunnel, et iront s’aiguiller sur les anciennes voies entre les tunnels des Batignolles et le tunnel construit sous le square. Ces deux groupes présenteront une largeur totale de 10 mètres, et seront couverts au moyen de fermes en fer reposant sur des colonnes en fonte reliées entre elles par des entablements également en fonte. De vastes salles d’attente, commodément distribuées pour le service des bureaux de bagages, etc., compléteront ce monument, qui deviendra ainsi l’un des plus vastes de Paris, destiné qu’il est à servir de tête de ligne à six exploitations différentes, Rouen, le Havre, Dieppe, Saint-Germain, Versailles et les départements de l’ouest.
Il entre dans les projets de la compagnie de percer une nouvelle rue servant de prolongement à la rue de l’Arcade et de continuation à la rue de Rome, qui vient déboucher sur la place de l’Europe. L’affluence toujours croissante des voyageurs sur les différentes lignes rend insuffisante la rue d’Amsterdam, à laquelle la nouvelle rue servirait de parallèle. On aura une idée du nombre prodigieux de voyageurs qui partent de la gare de la place du Havre, lorsque l’on saura que sur la seule ligne de Versailles on a transporté, en 1851, deux millions cent mille voyageurs.
L’atelier de Clichy, le moins important des trois, est établi entre les fortifications et le pont d’Asnières : c’est là que l’on transporte les 9 000 mètres cubes de terre que l’on enlève pour l’agrandissement de la gare de Paris. Par une prévision de la loi, on devait ajouter deux voies aux voies établies entre Paris et Asnières, aux frais de la compagnie de Saint-Germain et de celle de Rouen ; on peut considérer cette prévision comme réalisée. Ces deux voies supplémentaires sont désormais indispensables, tant en vue de l’accroissement réalisé que pour les besoins du chemin de fer de ceinture récemment décrété, et dont la voie de Saint-Germain jusqu’à Asnières et la ligne de la rive droite font partie.
Le raccordement du chemin de fer de Versailles (rive droite) avec celui de l’Ouest est établi auprès de la station de Viroflay, à deux kilomètres environ de Versailles. Là aussi les travaux sont poussés avec activité ; là aussi les propriétaires que l’on doit exproprier augmentent leurs prétentions en raison du besoin que l’on a de leurs terrains pour la continuation de ces constructions.
L’expropriation portait sur des maisons d’habitations rurales, sur des jardins, des étendoirs de blanchisseuses, des terres de culture.
L’ensemble des demandes faites par les propriétaires et locataires s’élevait à .......... 307 284 fr 27 c
Les offres de la compagnie étaient de .......... 55 480 fr 75 c
Le jury a alloué .......... 88 891 fr 15 c
C’est-à-dire 33 131 fr. en sus des offres, et 218 393 fr au dessous des demandes. Les travaux nécessités par le raccordement des deux voies auront une longueur de 1 407 mètres. Cet énorme remblai traversera la route nationale de Paris à Brest, sous un angle de 37° 37’, sur un viaduc en maçonnerie de 22 arches de 10 mètres d’ouverture, dont 15 du côté de la rive droite. A la suite de ces 15 arches et entre deux piles formant culées, il s’en élèvera trois en arc de cercle, s’appuyant sur deux entablements en fonte, supportés eux-mêmes par des colonnes en fonte d’un mètre de diamètre. Cette substitution des colonnes de fonte à des piles de maçonnerie a pour but d’éviter, dans une partie du viaduc, un appareil biais difficile, qui en altérerait, la solidité et la régularité. Le système qui consiste à faire porter des voûtes en maçonnerie sur des points d’appui en fonte est nouveau en France, mais dans les chemins de fer anglais il existe de nombreux exemples de ce genre de construction. Les dimensions des colonnes sont calculées de telle sorte que la charge qu’elles auront à supporter ne soit que de 152 kilo par centimètre carré de section, soit la charge admise généralement dans des constructions analogues. Du côté de Versailles, le viaduc se terminera par quatre arches en maçonnerie. La longueur totale du viaduc sera de 256 mètres, et la hauteur du rail au-dessus de la route nationale sera de 13 mètres 18 centimètres. Les matériaux employés sont la pierre de taille pour bandeaux, la meulière pour parements extérieurs, et la brique pour la partie qui traverse la route. Le cube total des terrassements sera de 39 000 mètres.
L’état actuel des travaux, nos dessins le montraient il y a quelques jours à peine ; mais les choses ont déjà bien changé : c’est à vue d’œil que l’on voit s’élever les arcades, le terrain s’aplanir, le tunnel se creuser. Cette rapidité de construction n’a été surpassée que par le palais d’Aladin, qui parut un beau matin au milieu de la place publique de la capitale de la Chine. Une nuit avait suffi pour le construire, une nuit suffit pour le voir disparaître : il n’en sera pas ainsi de ces grandes œuvres d’art et d’industrie. Malgré la rapidité de la construction, due aux efforts persévérants des intelligents directeurs du chemin de fer de Saint-Germain, l’habileté et la science de M. Flachat, qui a dressé le plan des travaux et dirigé leur exécution, garantissent la sûreté et la solidité de cette œuvre contre le destin funeste du palais des Mille et une Nuits.
P. BLANCHARD.